Un employeur voit l’un de ses salariés, avec lequel il est en litige, produire en justice un certificat médical rédigé par le médecin du travail faisant état de « pratiques maltraitantes » dans l’entreprise. Une rédaction tendancieuse, selon l’employeur, qui justifie, selon lui, une sanction disciplinaire du médecin du travail…
Certificat médical tendancieux = sanction ?
Un médecin du travail reçoit un salarié qui se plaint de son employeur et qui fait état d’un « enchaînement délétère de pratiques maltraitantes » de la part de son employeur à son encontre. Le médecin du travail rédige un certificat médical en retranscrivant les propos tenus par le salarié.
Par la suite, ce salarié se retrouve en litige avec son employeur : au cours du litige, il va produire le certificat médical rédigé par le médecin du travail. Et le salarié va gagner son procès contre son employeur.
Mécontent, ce dernier porte plainte contre le médecin du travail devant les instances disciplinaires de l’Ordre des médecins. Pour l’employeur, le médecin du travail a manqué à ses obligations déontologiques en reproduisant dans le certificat médical les propos du salarié qui a fait état d’un « enchaînement délétère de pratiques maltraitantes » dont se plaignait le salarié.
Or, le médecin du travail n’a jamais constaté par lui-même les allégations de son salarié. Dès lors, le certificat médical rédigé par le médecin du travail est « tendancieux », ce qui est interdit par la Loi. Le prononcé d’une sanction disciplinaire contre le médecin du travail paraît donc justifié pour l’employeur.
Action irrecevable, estime le médecin du travail : il rappelle que l’employeur se base sur un certificat médical pour fonder son action en justice. Or, ce certificat médical est protégé par le secret médical. L’employeur ne peut donc pas s’en prévaloir pour réclamer une sanction à son encontre.
« Faux » répond le juge : l’employeur peut tout à fait se prévaloir du certificat médical, produit par le salarié en justice, pour réclamer une sanction du médecin du travail, dès lors que ce certificat médical le lèse de manière suffisamment directe et certaine. Ce qui est le cas ici : l’action de l’employeur est donc recevable.
Notez que le médecin du travail a ici été sanctionné par un avertissement.
Source : Arrêt du Conseil d’Etat, du 6 juin 2018, n° 405453