Une société gérant un commerce de détail alimentaire et son dirigeant sont poursuivis pour avoir illégalement ouvert le dimanche et la nuit. Illégalement ? Non, si on en croit la convention collective, se défendent-ils…
Travail dominical, travail nocturne : appliquer la convention collective ?
Un commerce de détail alimentaire fait l’objet d’un contrôle réalisé par l’inspecteur du travail. Ce dernier constate alors que des salariés ont, pendant plusieurs mois, travaillé notamment après 21 heures et le dimanche après 13 heures.
De quoi constituer, selon l’inspecteur du travail, plusieurs infractions.
- Concernant le travail de nuit
Pour rappel, il n’est possible de recourir au travail de nuit que de façon exceptionnelle et en considération de la situation propre à chaque établissement, et seulement lorsqu’il est justifié par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou de services d’utilité sociale. Critères qui, ici, ne sont pas remplis, d’après l’inspecteur du travail.
« Si », rétorque l’entreprise :
- d’une part le commerce est situé dans une grande métropole où beaucoup de travailleurs finissent tard le soir, ce qui répond au critère d’utilité sociale ;
- d’autre part, la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire (présumée légale) permet le travail de nuit avec des compensations et des garanties liées au volontariat des salariés concernés.
Arguments insuffisants, pour le juge qui rappelle qu’il doit vérifier le caractère exceptionnel et justifié du travail de nuit, quitte à écarter les clauses de la convention collective qu’il estimerait non conformes. L’affaire devra donc être rejugée pour procéder à ce contrôle.
- Concernant le travail dominical
Par principe, le repos hebdomadaire est accordé aux salariés le dimanche. Toutefois, la Loi permet, dans les commerces de détail alimentaire, de donner ce repos hebdomadaire le dimanche à partir de 13 heures.
Pourtant, dans cette affaire, l’inspecteur du travail a constaté que des salariés ont travaillé, pendant plusieurs mois, les dimanches après 13 heures, sans autorisation préfectorale permettant de déroger au principe.
Certes, rétorque l’entreprise, mais la convention collective prévoit que « les établissements pourront être amenés à ouvrir régulièrement ou occasionnellement le dimanche ». Elle a donc tout simplement respecté la convention collective.
Sauf que la possibilité de déroger à la règle du repos dominical après 13 heures ne peut résulter que d’une disposition légale précise, souligne le juge.
Dans tous les cas, il n’est donc pas possible, pour l’employeur, de se retrancher derrière la convention collective dès lors que les critères « d’ordre public » ne sont pas respectés.
Source : Arrêt de la Cour de Cassation, chambre criminelle, du 7 janvier 2020, n° 18-83074