Parce que son bailleur refuse que le bail commercial soit renouvelé, un restaurateur décide de quitter le local loué. Mais par la suite, le bailleur change d’avis : « trop tard », estime le restaurateur qui réclame une indemnité d’éviction. « A tort », répond le bailleur qui considère que le bail est renouvelé…
Refus de renouvellement du bail commercial : le bailleur peut se repentir !
Pour mémoire, un bailleur peut, à la suite d’un refus de renouvellement d’un bail commercial, changer d’avis en exerçant son « droit de repentir ».
Pour exercer ce droit de repentir, il faut que le locataire n’ait pas engagé un processus irréversible de départ des lieux, rendant impossible la continuation de l’exploitation du fonds de commerce dans les locaux loués. C’est ce qu’a tenté de faire jouer un bailleur dans une affaire récente qui l’a opposé à son locataire.
Un restaurateur sollicite le renouvellement de son bail commercial. Le bailleur refuse ce renouvellement et refuse de verser une indemnité d’éviction pour motif grave et légitime, à la suite du constat que de nombreux dégâts sont à dénombrer dans le local loué.
Le restaurateur informe alors le bailleur de son intention de quitter le local loué et déménage son activité. Il précise au bailleur qu’il lui rendra les clés du local le 5 janvier.
Mais le 4 janvier, le bailleur exerce son droit de repentir. « Trop tard », répond le restaurateur : ayant déjà commencé à déménager, il estime que le bailleur ne peut plus exercer son droit de repentir. Il rend ensuite les clés du local le 23 janvier.
Par la suite, le restaurateur conteste en justice le refus de versement d’une indemnité d’éviction…
… à tort, pour le juge, puisque l’indemnité d’éviction est due à l’occasion d’un refus de renouvellement. Or, pour le juge constate, le bail a bien été renouvelé : au 4 janvier, le bailleur pouvait encore exercer son droit de repentir puisque le restaurateur n’avait pas libéré le local de tous les meubles qui l’encombraient et n’a rendu les clés que le 23 janvier. Dès lors, un bail commercial de 9 ans a bien été renouvelé. La demande d’indemnités d’éviction du restaurateur est donc rejetée.
Source : Arrêt de la Cour de cassation, 3ème chambre civile, du 31 mai 2018, n° 17-14179