Du fait de la crise sanitaire liée à l’épidémie de covid-19, de nombreuses entreprises recourent au dispositif de l’activité partielle. Pourtant, ce recours n’est justifié qu’à partir du moment où il n’existe pas d’autre mesure permettant d’y échapper. La question des congés se pose alors…
Coronavirus (COVID-19) : imposer ou modifier des dates de congés payés ?
Le principe est établi par un accord collectif. L’employeur fixe l’ordre des départs en congés payés, conformément aux conventions collectives en vigueur, le cas échéant. Il ne peut modifier unilatéralement l’ordre et les dates de départ qu’en respectant les délais prescrits par l’accord collectif, le cas échéant.
Faute d’accord. A défaut d’accord collectif, l’employeur définit l’ordre des départ (selon des critères objectifs tenant, notamment, à la situation de famille et à l’ancienneté), après avis, le cas échéant, du comité social et économique (CSE). Il ne peut pas modifier l’ordre et les dates de départ moins d’un mois avant la date de départ prévue, sauf en cas de circonstances exceptionnelles.
Application au Covid-19. Au vu de la situation exceptionnelle, l’employeur peut déplacer les congés posés par ses salariés.
Un accord dérogatoire. Afin de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du covid-19, il est d’ores et déjà possible de négocier un accord collectif (de branche ou d’entreprise) permettant à l’employeur d’imposer la prise de congés payés ou de modifier les dates d’un congé déjà posé, dans la limite de 6 jours ouvrables (soit une semaine de congés payés).
Le saviez-vous ?
Si un tel accord collectif le prévoit, l’employeur peut imposer la prise de congés payés avant l’ouverture de la période au cours de laquelle ils ont normalement vocation à être pris, ou modifier unilatéralement les dates de prise de congés payés.
Un délai de prévenance. L’accord dérogatoire doit néanmoins prévoir que l’employeur respectera un délai de prévenance qui ne peut pas être inférieur à 1 jour franc. Pour rappel, un jour franc est un jour qui dure de 0h à 24h, sans tenir compte du jour de la décision à l’origine du délai, ni du jour de l’échéance. Lorsque le jour franc expire un samedi, un dimanche ou un jour férié, le délai est prorogé jusqu’au prochain jour ouvrable.
Autres autorisations. L’accord dérogatoire autorisant l’employeur à imposer ou modifier les congés peut également l’autoriser :
- à fractionner les congés sans l’accord du salarié ;
- à fixer les dates des congés sans être tenu d’accorder un congé simultané à des conjoints ou des partenaires liés par un pacte civil de solidarité travaillant dans son entreprise.
Une faculté temporaire. La période de congés imposée ou modifiée, dans cette situation, ne peut s’étendre au-delà du 30 juin 2021.
Consultation du CSE. L’employeur peut informer le CSE concomitamment à la mise en œuvre de ces mesures. L’avis du CSE pourra être rendu dans un délai d’un mois à compter de cette information.
Reporter la 5e semaines de congés payés ? Le Ministre du Travail a évoqué la possibilité, pour les entreprises les plus durement touchées par la crise, notamment en raison des fermetures administratives ou des restrictions de déplacement, de reporter la 5e semaine de congés payés en application d’un accord de branche ou d’un accord d’entreprise.
Coronavirus (COVID-19) : imposer ou modifier des jours de repos ?
Imposer des RTT ? Si un accord collectif réserve à l’employeur la possibilité d’imposer, à sa convenance, des jours de RTT, il peut le faire. Cela signifie que la règle varie selon les accords d’entreprise ou de branche.
Une dérogation permise. Si l’entreprise est couverte par un accord ou une convention collective instituant un dispositif de réduction du temps de travail, l’employeur peut, dans la limite de 10 jours et lorsque l’intérêt de l’entreprise le justifie eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du covid-19, imposer ou modifier des jours de repos que le salarié a acquis. L’employeur doit alors respecter un délai de prévenance d’au moins un jour franc.
Cas de la convention de forfait en jours sur l’année. Lorsque l’intérêt de l’entreprise le justifie eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du covid-19, l’employeur peut imposer ou modifier des dates de jours de repos, en principe prévus par la convention de forfait, dans la limite de 10 jours. L’employeur doit alors respecter un délai de prévenance d’au moins un jour franc.
Mobiliser les jours de repos affectés à un compte-épargne temps. Lorsque l’intérêt de l’entreprise le justifie eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du covid-19, l’employeur peut imposer que les droits affectés sur le compte épargne-temps du salarié soient utilisés par la prise de jours de repos, dont il détermine les dates, dans la limite de 10 jours. Là encore, il doit respecter un délai de prévenance d’au moins un jour franc.
Des facultés limitées dans le temps. La période de prise des jours de repos imposée ou modifiée ne peut s’étendre au-delà du 30 juin 2021.
Consultation du CSE. L’employeur peut informer le CSE concomitamment à la mise en œuvre de ces mesures. L’avis du CSE pourra être rendu dans un délai d’un mois à compter de cette information.
Coronavirus (COVID-19) : don de rémunération et de jours de repos
Des congés affectés à un fonds de solidarité. Du 12 mars au 31 décembre 2020, l’employeur peut être autorisé, par un accord d’entreprise ou de branche, à imposer aux salariés placés en activité partielle qui bénéficient du maintien intégral de leur rémunération, en application de dispositions conventionnelles, d’affecter des jours de repos conventionnels ou une partie de leur congé annuel excédant 24 jours ouvrables à un fonds de solidarité. Ainsi, ils seront monétisés pour compenser tout ou partie de la diminution de rémunération subie, le cas échéant, par les autres salariés placés en activité partielle.
Convertir ses congés restants. De même, si un accord d’entreprise ou de branche le lui permet, un salarié placé en activité partielle peut demander la monétisation des jours de repos conventionnels ou d’une partie de son congé annuel excédant 24 jours ouvrables, en vue de compenser tout ou partie de la diminution de rémunération qu’il a subie.
Quels congés ? Dans les 2 cas, les jours de repos conventionnels (prévus par un dispositif de réduction du temps de travail ou par une convention de forfait) et de congé annuel susceptibles d’être monétisés sont les jours acquis et non pris, qu’ils soient ou non affectés un compte épargne temps.
Monétisation limitée à 5 jours. Le nombre total de jours de repos conventionnels et de congé annuel pouvant être monétisés ne peut excéder 5 jours par salarié.
Monétisation : quelle incidence en paye ? L’Urssaf traitera différemment le régime social de ce complément, issu de la monétisation, en fonction de la rémunération du salarié. Parce que la somme monétisée complète l’activité partielle, le régime social qui lui est appliqué est le même que celui de l’indemnité d’activité partielle.
Sommes versées au salarié au plus égales à 3,15 Smic. Lorsque la somme globale perçue par le salarié (indemnité d’activité partielle et monétisation des jours de congés) ne dépasse pas 3,15 Smic, l’intégralité de la somme a la nature de revenu de remplacement. Elle est alors exonérée de l’ensemble des cotisations et contributions sociales assises sur les revenus d’activité, mais reste soumise à la CSG applicable sur les revenus de remplacement (6,2 %) et la CRDS (0,5 %) après abattement pour frais professionnels (1,75 %).
Sommes versées au salarié supérieures à 3,15 Smic. En revanche, lorsque la somme globale perçue par le salarié dépasse le seuil de 3,15 Smic, la partie excédante est assimilée à un revenu d’activité et est donc soumise aux cotisations et contributions sociales applicables aux salaires.
Exigibilité des cotisations. Les cotisations sont dues lors du versement de la somme issue de la monétisation au salarié destinataire.
Jusqu’au 31 octobre 2020, un salarié peut décider de renoncer à sa rémunération au titre d’une ou plusieurs journées de travail. Il peut également renoncer, à sa demande et en accord avec l’employeur, sans contrepartie, à des jours de repos acquis et non pris, qu’ils aient été affectés ou non sur un compte épargne-temps.
Un don limité ? Le don de jours de repos sera limité à un seuil fixé dans un Décret à venir. Ces jours de repos seront, en outre, convertis en unités monétaires.
Versement des sommes. Les sommes issues de ces dons seront versées par l’employeur à l’Agence nationale pour les chèques-vacances (un Décret à venir précisera les modalités de ce versement).
A noter. Un accord collectif d’entreprise peut prévoir un abondement de l’employeur en complément de ces versements. Par ailleurs, sachez que ces dons n’ouvrent droit à aucune réduction d’impôt.
Remise des chèques-vacances aux établissements de santé. L’agence nationale pour les chèques-vacances remettra les sommes récoltées aux établissements et services sanitaires, sous forme de chèques-vacances, en tenant compte de leurs effectifs.
Répartition des chèques-vacances entre les personnels de santé. Les établissements et services sanitaires procèderont ensuite à la répartition des chèques-vacances entre leurs personnels, y compris vacataires et stagiaires, ayant travaillé entre le 12 mars 2020 et le 10 mai 2020 et dont la rémunération n’excède pas le triple du salaire minimum interprofessionnel de croissance.
Pas d’impôt ! L’acquisition de chèques-vacances pour ces personnels est exonérée de l’impôt sur le revenu.
Bon à savoir. Les sommes versées à l’Agence nationale pour les chèques-vacances qui n’auront pas été distribuées sous forme de chèques-vacances au 31 décembre 2020 seront reversées au Trésor public.
Coronavirus (COVID-19) : une aide au paiement des congés payés des salariés en activité partielle
Une aide au paiement des congés payés ? Pour rappel, le salarié placé en activité partielle continue d’acquérir des congés payés, que l’entreprise devra rémunérer le moment venu. Une dépense supplémentaire que les entreprises concernées craignent de ne pas pouvoir assumer du fait de l’impact économique de cette crise sanitaire. Aussi, le Gouvernement entend soutenir les entreprises des secteurs les plus touchés via une aide économique ponctuelle et non reconductible.
Concrétisation. Cette aide au paiement, annoncé en décembre 2020, vient d’être effectivement mise en place le 1er janvier 2021.
Conditions d’éligibilité à l’aide au paiement des congés payés. Peuvent bénéficier de cette aide l’entreprise répondant à l’une ou l’autre de ces conditions :
- son activité a été interrompue partiellement ou totalement pendant une durée totale d’au moins 140 jours depuis le 1er janvier 2020 ;
- son activité a été réduite de plus de 90 % (baisse du chiffre d’affaires) pendant les périodes en 2020 où l’état d’urgence sanitaire était déclaré.
Le saviez-vous ?
Ces 2 seuils rendent notamment éligibles les cafés et restaurants, ainsi que les hôtels qui, bien que n’étant pas administrativement fermés, ont été contraints à la fermeture par manque de clients du fait des restrictions de déplacement.
L’aide bénéficiera aussi aux secteurs les plus touchés par les fermetures administratives et les conséquences de la crise comme par exemple l’événementiel, les discothèques ou encore les salles de sport, dès lors que les entreprises concernées rempliront l’une ou l’autre des conditions fixées.
Une aide limitée. Cette aide est limitée à 10 jours de congés payés. Elle sera versée en janvier 2021 sur la base de jours imposés au titre de l’année 2019-2020 (généralement 5) et de jours pris en anticipation avec l’accord du salarié au titre de l’année 2020-2021.
Montant. Cette aide est égale, pour chaque salarié et par jour de congé payé, à 70 % de l’indemnité de congés, rapportée à un montant horaire et, limitée à 4,5 SMIC horaire. Ce montant horaire ne peut être inférieur à 8,11 euros (sauf pour les contrats d’apprentissage et de professionnalisation). Ce montant horaire est calculé en rapportant chaque jour de congé payé à la durée quotidienne de travail applicable au salarié ou, si cette durée ne peut être déterminée, à 7 heures.
Demande. L’employeur qui bénéficie d’une autorisation d’activité partielle doit adresser une demande d’aide, par voie dématérialisée. Cette demande précise le motif de recours à l’aide. L’employeur informe le comité social et économique (CSE), le cas échéant, de la demande de versement de cette aide. Les entreprises devront préciser dans leur demande d’indemnisation du mois de janvier les jours correspondants à des congés payés. L’indemnisation sera versée une dizaine de jours suivant la demande.
Pensez à vous organiser ! Parce que l’employeur ne peut plus modifier les dates de congés payés moins de 30 jours avant la date du congé, il doit dès à présent s’organiser et réunir, le cas échéant, son comité social et économique (CSE).
Date de prise des congés pour bénéficier de l’aide. Les congés payés pris en charge par l’Etat devront nécessairement être pris entre le 1er et le 20 janvier 2021, durant une période d’activité partielle correspondant à la fermeture prolongée de l’établissement sur cette période.
Modalités de versement de l’aide. Concrètement, le Gouvernement procèdera au versement de cette aide via l’Agence de services et de paiement (ASP).
Prolongation. Cette aide pourra être versée aux employeurs au titres des congés payés pris jusqu’au 31 janvier 2021 et sera reconduite pour les congés pris entre le 1er février et le 7 mars 2021, à condition que ces derniers aient placé un ou plusieurs salariés en position d’activité partielle pendant cette même période. Les conditions liées aux bénéficiaires, à la durée, au montant, à la demande et au versement de l’aide restent identiques.
A retenir
De nombreux dispositifs sont mis en place pour venir en aide aux entreprises confrontées à la crise du coronavirus. N’hésitez pas à solliciter l’aide de vos conseils et de vos interlocuteurs bancaires et administratifs habituels.
Sources
- Articles L3141-12 et suivants du Code du travail
- Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19
- Ordonnance n° 2020-323 du 25 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière de congés payés, de durée du travail et de jours de repos
- travail-emploi.gouv.fr, Actualité – Coronavirus : Questions/réponses pour les entreprises et les salariés
- Ordonnance n° 2020-389 du 1er avril 2020 portant mesures d’urgence relatives aux instances représentatives du personnel
- Loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne (articles 1, 5, 6, 11, 12 et 53)
- Loi n° 2020-938 du 30 juillet 2020 permettant d’offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l’épidémie de covid-19
- www.urssaf.fr, Actualité du 21 septembre 2020 – Covid-19 : monétisation des jours de repos afin de compenser la baisse de rémunération
- Communiqué de presse du Ministère du travail, Congés payés : Le Gouvernement apporte un soutien supplémentaire aux entreprises fermées du fait de la crise sanitaire, du 2 décembre 2020
- Ordonnance n° 2020-1597 du 16 décembre 2020 portant mesures d’urgence en matière de congés payés et de jours de repos, de renouvellement de certains contrats et de prêt de main-d’œuvre
- Communiqué de presse du Gouvernement, du 31 décembre 2020 : Congés payés : Publication du décret relatif à la prise en charge exceptionnelle des congés payés des salariés des secteurs les plus touchés par la crise
- Décret n° 2020-1787 du 30 décembre 2020 relatif à l’aide exceptionnelle accordée aux entreprises accueillant du public au titre des congés payés pris par leurs salariés entre le 1er et le 20 janvier 2021
- Décret n° 2021-44 du 20 janvier 2021 relatif à l’aide exceptionnelle accordée aux entreprises accueillant du public au titre des congés payés pris par leurs salariés