A l’occasion de la conclusion d’un bail commercial, il est souvent mentionné une clause imposant l’agrément du bailleur en cas de cession du bail. Mais cette clause est-elle valable lorsque la cession du bail survient dans le cadre d’un départ à la retraite ? Un juge vient de répondre à cette question…
Départ en retraite et cession du fonds de commerce = interdiction des clauses d’agrément ?
Le gérant d’un bar décide de partir à la retraite. Souhaitant céder son droit au bail, il trouve un acquéreur. Il notifie alors son intention de céder son droit au bail au propriétaire du local commercial où il exerce son activité.
Dans cette notification, il est demandé au propriétaire s’il souhaite user de son droit de priorité de rachat, prévu par la Loi. Si tel n’est pas le cas, il est demandé au propriétaire d’agréer à la cession du droit au bail, comme le prévoit le bail.
Le propriétaire fait par la suite savoir qu’il use de son droit de priorité de rachat.
Mais la vente n’est pas finalisée entre le propriétaire et le gérant du bar. Ce dernier signe alors un acte de cession de son fonds de commerce au profit de l’acquéreur évincé, malgré l’absence d’agrément du propriétaire à cette cession.
Le propriétaire, apprenant que la cession du droit au bail a lieu sans son agrément réclame la nullité de la vente.
Un accord amiable intervient alors entre l’acquéreur et le propriétaire pour la vente du fonds de commerce au profit de ce dernier. Mais l’acquéreur réclame tout de même des dommages-intérêts pour le préjudice subi…
… à tort, pour le propriétaire. Pour lui, l’acquéreur n’a subi aucun préjudice puisque la vente a été conclue :
- en violation de sa priorité de rachat prévue par la Loi ;
- en violation de la clause d’agrément prévue au bail.
« Examinons justement cette clause » répond alors l’acquéreur. Ce dernier rappelle alors que la Loi prévoit, dans le cadre de la cession d’un fonds de commerce concomitant à un départ en retraite du locataire, un droit de priorité de rachat au profit du propriétaire et seulement un droit prioritaire de rachat.
Dès lors, la clause imposant, en sus du droit de priorité de rachat, une clause d’agrément du bailleur, en cas de départ à la retraite du locataire est contraire aux dispositions d’ordre public de la cession de bail.
Ce que confirme le juge : et parce que cette clause d’agrément est contraire aux dispositions d’ordre public de la cession de bail et parce qu’elle a causé un préjudice à l’acquéreur, ce dernier a droit à des dommages-intérêts.
Source : Arrêt de la Cour de cassation, 3ème chambre civile, du 5 avril 2018, n° 17-14882