Un architecte et un client signent un contrat de maîtrise d’œuvre pour la construction d’une maison individuelle. Mais le chantier va être interrompu et un litige va apparaître, le client reprochant à l’architecte de se comporter comme un constructeur, ce qui change (juridiquement) tout…
Un architecte peut être un « constructeur » !
Une architecte signe un contrat de maîtrise d’œuvre avec un client pour la construction d’une maison individuelle. 13 artisans interviennent ensuite sur le chantier, sur 13 lots différents. Pour chaque artisan, un devis a été présenté par l’architecte au client, sans mise en concurrence.
Par la suite, un litige survient entre l’architecte, les artisans et le client à propos de malfaçons et de paiement des factures des artisans. Le chantier est interrompu et, à la demande de l’architecte, les artisans démontent et reprennent leur matériel.
Le client demande alors à ce que le contrat de maîtrise d’œuvre soit requalifié en contrat de construction de maison individuelle (CCMI). Cette requalification a pour but d’obtenir la nullité du contrat, les mentions obligatoires du CCMI faisant défaut, et d’engager la responsabilité de l’architecte.
Requalification que conteste l’architecte : elle rappelle qu’aux termes du contrat de maîtrise d’œuvre, elle doit seulement assurer une mission de suivi de chantier. Ne s’étant pas chargée de la construction de la maison, le contrat ne peut donc pas être requalifié en CCMI.
Sauf que le contrat de maîtrise d’œuvre comprend en annexe la facture de l’architecte ayant établi les plans, les devis des 13 artisans en charge des lots et un document récapitulatif des prix des différents artisans faisant apparaître le coût total de la construction.
En outre, l’architecte a choisi les artisans et fait établir les devis sans mise en concurrence avant de les présenter au client, qui a donné son accord sur un prix global et définitif.
Au vu de ces faits, le client considère que l’architecte a assuré la maîtrise et la direction de toute l’opération et s’est donc chargée de l’intégralité de la construction. Le contrat signé n’est donc pas un contrat de maîtrise d’œuvre, mais bien un CCMI.
« Exact » confirme le juge : parce que l’architecte a dirigé l’opération de construction et n’a pas assuré une simple mission de suivi du chantier, le contrat signé est un CCMI. Et comme le contrat ne comporte pas les mentions obligatoires, il est nul, la responsabilité de l’architecte étant engagée.
Source : Arrêt de la Cour de cassation, 3ème chambre civile, du 3 mai 2018, n° 17-15067