Une société commercialise un aspirateur qu’elle présente comme le meilleur sur le marché. A tort, selon un concurrent, qui estime qu’il est victime d’une publicité trompeuse qui porte atteinte à son image. « Non » répond la société qui lui recommande de mieux lire son message publicitaire…
Publicité mensongère = dommages-intérêts pour le concurrent ?
Une société qui commercialise des aspirateurs produit un nouveau modèle et, à cette occasion, procède à une vaste campagne publicitaire. Elle indique, dans cette campagne publicitaire, que son nouvel aspirateur a la meilleure performance de nettoyage.
Mais un concurrent conteste cette publicité : il estime qu’elle est trompeuse et caractéristique d’un acte de concurrence déloyale, ce qui justifie le versement de dommages-intérêts.
Le juge prend alors connaissance de la campagne publicitaire pour se faire son avis. Il constate que :
- l’emballage de l’aspirateur contient le slogan « la meilleure performance de nettoyage » écrit visiblement et lisiblement en majuscules ;
- ce slogan est systématiquement suivi d’un astérisque qui renvoie à la mention restrictive suivante : « parmi les balais sans-fil » ;
- cette mention restrictive est également présente en bas de la page de couverture de l’étiquette accrochée sur le produit en démonstration en magasin ;
- cette étiquette comporte également, en page de couverture, le slogan précité, qui n’est cette-fois pas suivi d’un astérisque renvoyant à la mention restrictive ; cet astérisque est toutefois présent dans l’anneau blanc qui entoure le logo composé du chiffre « 1 » et d’une couronne de laurier.
Pour la société qui commercialise l’aspirateur, le client moyennement averti doit pouvoir considérer les affirmations publicitaires avec une certaine prudence. Dès lors, elle estime qu’un client moyennement averti sera suffisamment vigilant pour faire attention à la mention restrictive et comprendre que l’allégation portée par le slogan est limitée dans sa portée. Il n’y a donc pas de publicité mensongère.
« Faux » estime son concurrent : sur l’emballage, il constate que la restriction est inscrite en petits caractères à la verticale sur un des côtés de l’emballage et que sa lecture est peu aisée. Quant à l’étiquette, le petit « 1 » qui compose le logo et renvoie à la restriction est tout simplement invisible à l’œil nu tandis que la restriction est ici aussi écrite en caractères minuscules illisibles.
En outre, il ressort des tests réalisés postérieurement à la sortie de l’aspirateur que ce dernier n’est pas le plus performant. Il arrive, en effet, en 3ème position.
Pour le juge, au vu des éléments de preuve qui lui sont soumis, les renvois sont pratiquement illisibles et la mention restrictive ne permet pas au client moyen normalement informé et raisonnablement attentif et avisé d’avoir un accès à une information lui permettant de faire un choix rationnel.
La campagne publicitaire de la société est donc trompeuse et répréhensible. Mais le concurrent doit-il pour autant être indemnisé ?
« Non », répond la société : elle constate que les résultats financiers de son concurrent sont satisfaisants. Il n’a donc pas, selon elle, subi de préjudice indemnisable.
« Faux » répond le concurrent : pour lui, la publicité mensongère a altéré le comportement économique de leur clientèle. Les accroches publicitaires ont forcément capté la clientèle en l’induisant en erreur. Il a donc subi un préjudice consistant :
- en une atteinte à l’image ;
- une perte de chance d’acquérir ou de conserver des clients.
« Exact » confirme le juge qui condamne la société à indemniser son concurrent (le préjudice a ici été évalué à 400 000 €).
Source : Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 13 juin 2018, n° 16-22054